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littérature, à l’occasion des discussions qui, depuis le livre De l’Allemagne de madame de Staël, s’étaient déjà élevées sur le genre classique et sur le genre romantique. Cette première exposition de principes est calme, modeste et raisonnée. Tout en parlant de la nécessité de donner à l’époque une littérature qui soit son expression, M. Victor Hugo insiste sur la nécessité de respecter les règles éternelles du goût, le génie et les lois de la langue. En même temps, il se montre fidèle aux convictions religieuses et politiques qui ont, jusque-là, inspiré son talent ; il a même l’intuition des dangers que l’esprit de l’antiquité peut apporter dans une société chrétienne, quand il domine la littérature, à l’exclusion de l’esprit chrétien. Voici les principaux passages de ce premier manifeste, qui indique la situation de l’esprit de M. Victor Hugo en 1824, et le point où en étaient les idées littéraires de l’école naissante qui marchait avec lui :

« L’auteur ignore profondément ce que c’est que le genre classique et le genre romantique. En littérature comme en toutes choses, il n’y a que le bon et le mauvais, le vrai et le faux, le beau et le difforme. Il y a autant de littératures diverses que de sociétés différentes. David, Homère, Virgile, le Tasse, Milton et Corneille, ces hommes, dont chacun représente une poésie et une nation, n’ont de commun entre eux que le génie ; chacun d’eux a exprimé et a fécondé la pensée publique dans son pays et dans son temps. Il faut en convenir, un mouvement vaste et profond travaille