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échos du monde, était donc, pour M. Victor Hugo, un moyen de bonheur, et les voies larges et fréquentées de la célébrité devaient le conduire à cette douce retraite du foyer domestique où se trouvent les félicités les plus obscures et les plus vraies.

La première forme sous laquelle lui apparut la poésie, ce fut celle du souvenir et du regret. Les malheurs de cette royauté qu’avait tendrement aimée sa mère et qu’il aimait ; les crimes de cette révolution qui avait porté ses mains sanglantes sur la majesté, la vertu, la beauté et l’innocence, se levèrent devant lui : la pitié et l’indignation dictèrent ses premiers vers. L’ode religieuse, morale et politique, voilà quelle fut la première manifestation du talent de M. Victor Hugo ; il avait rencontré dès lors, dans une nouvelle application de la poésie lyrique, la forme la plus appropriée à son génie. Dans ces premiers vers, composés par un poëte si jeune, il y a beaucoup d’inexpérience encore ; le vol de la pensée n’est pas toujours soutenu comme dans la poésie de M. de Lamartine ; la versification n’est pas toujours aussi correcte, aussi châtiée, aussi savamment harmonieuse que dans les compositions de M. Delavigne ; mais il y a de l’élan, de la sève, de l’énergie, de l’éclat. On devine, même à travers les imperfections de sa versification, une riche nature ; le sentiment poétique s’y trouve à un très-haut degré, et à côté de négligences assez fréquentes, on admire une élévation de pensée et des beautés de rhythme qui révèlent le véritable poëte. La poésie personnelle, qui est presque exclusi-