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à l’île d’Elbe, de l’île d’Elbe à Paris, de Paris à Rome, de Rome à Naples ; puis il avait un moment séjourné dans la province d’Avellino, dont son père avait été nommé gouverneur. C’était dans ce temps que les bandes de la Calabre, mi-politiques, mi-poétiques, donnaient tant de souci aux troupes impériales qui avaient plus de peine à atteindre ces ennemis insaisissables qu’à les vaincre. À sept ans, c’est-à-dire en 1809, Victor Hugo, qui, commençant bien jeune son odyssée, avait déjà vu tant de scènes diverses, tant de pays différents, revint en France avec sa mère et ses deux frères, et son éducation commença. Dans le vieux couvent des Feuillantines, situé à Paris, au fond du faubourg Saint-Jacques, et où il habita avec sa famille, il retrouva la poésie personnifiée dans deux figures, l’une riante comme l’espérance, l’autre sombre comme le malheur. Quand il avait parcouru les vertes allées du jardin, avec une belle et gracieuse petite fille sous les traits de laquelle son meilleur avenir lui était apparu, car elle devait être un jour sa femme, il allait prendre ses leçons dans un pavillon habité par un hôte mystérieux qui ne sortait jamais du couvent, dont sa mère ne lui parlait qu’un doigt sur les lèvres, et dont le front soucieux révélait un proscrit : c’était le général Lahorie, qui, compromis dans le procès du général Moreau, et traqué par la police impériale, avait demandé à madame Hugo ce qu’une Vendéenne ne refusa jamais, un asile. Pendant deux ans elle cacha son hôte à tous les yeux ; mais enfin, en 1811, la retraite du général Lahorie fut dénoncée, on