Page:Nettement - Histoire de la littérature française sous la restauration 1814-1830, tome 1.djvu/29

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nieux des survivants de la littérature du dix-septième siècle, et M. de Fontanes, l’homme de la tradition, donnait des conseils dictés par le goût à ce jeune novateur dont il applaudissait l’audace avec une admiration mêlée d’un peu d’effroi. M. de Fontanes, qui connaissait depuis longtemps, on le voit, l’auteur et l’ouvrage, se chargea de préparer dans la presse périodique l’avénement du Génie du christianisme, que M. de Chateaubriand, arrivé en France au mois de mai 1800, avait soumis, par son conseil, à une entière retouche. Pour bien disposer l’opinion, on choisit dans l’ouvrage un épisode marqué d’un caractère de nouveauté qui devait frapper les esprits ; Atala, comme la Colombe biblique, se détacha gracieusement de l’arche pour aller effleurer de ses blanches ailes ce monde lui aussi récemment sorti d’un déluge, et où toutes les idées, tous les sentiments que le Génie du christianisme rapportait à la France, avaient hâte de s’élancer. D’autres extraits du Génie du christianisme parurent aussi dans le Mercure, auquel M. de Fontanes avait la principale part. L’effet fut grand, et La Harpe, qui tenait en ce moment la tête de la critique, envoya sur-le-champ chercher l’auteur : « Voici de la critique, s’écriait-il, voici de la littérature. Ah ! messieurs les philosophes, vous avez affaire à plus fort que vous ! Dans son enthousiasme d’homme de parti, le vieil athlète s’élevait au-dessus de sa propre poétique, et défendait contre Fontanes le merveilleux chrétien, condamné par Boileau. Les incorrections, les nouveautés, les hardiesses, il acceptait tout,