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puisant une partie de ses moyens d’action dans ses défauts, devenait la régulatrice des idées ; la manière de sentir et de juger, qui était, chez elle, l’effet d’une position et de circonstances exceptionnelles, se répandait dans l’atmosphère générale de notre littérature ; cette haine de la vie régulière, dont l’expression peut offrir quelque chose de pittoresque, mais dont la tendance est antisociale, s’introduisait par le charme d’une poésie puissante dans l’âme des jeunes écrivains appelés eux-mêmes à exercer une action. S’il y a un genre de supériorité à la portée des hommes les plus vulgaires, c’est cet esprit de dénigrement contre la société dont les poésies de lord Byron sont presque partout animées ; ceux qui n’ont pas de position dans l’ordre social aiment à se faire contre l’ordre social une position d’ironie aussi rien ne devait mieux réussir en France que cette tendance de lord Byron. Il faut y joindre ce sentiment d’un libéralisme indéterminé qui n’est, au fond, qu’une haine orgueilleuse contre l’autorité dont le poids paraît intolérable à notre nature. Certes, c’est une chose grande et belle que la liberté, mais il faut l’aimer dans les conditions possibles de son existence, sous des formes qui soient en harmonie avec les besoins de l’époque et le caractère de la nation à laquelle on veut la garantir, et il y a un libéralisme vague et indéfini qui n’est pas plus l’amour de la liberté vraie que le sentimentalisme n’est la sensibilité. À ce point de vue, les magnifiques lieux communs de liberté que Byron sema dans ses ouvrages