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plus des choses intellectuelles ; ce fut là qu’il rencontra mademoiselle Pauline de Meulan, qui, appartenant à une famille distinguée, mais ruinée par la révolution, avait trouvé dans la fondation d’un journal, le Publiciste, un aliment pour l’activité d’un esprit remarquablement doué et des ressources pour sa famille. Cette rencontre amena un incident un peu romanesque qui fut, entre mademoiselle de Meulan et M. Guizot, l’origine d’une amitié littéraire à laquelle devaient succéder des liens plus étroits. Mademoiselle de Meulan, étant tombée gravement malade, était très inquiète pour son journal, dont elle était l’âme et qui était son seul moyen d’existence, lorsqu’elle reçut une lettre dans laquelle on la priait de se tranquilliser, en lui annonçant que, tant que durerait sa maladie, on lui enverrait un article pour chaque numéro de son journal. La lettre contenait le premier envoi. Les idées de mademoiselle de Meulan, les habitudes de son style, tout se retrouvait imité, reproduit avec une scrupuleuse fidélité dans ce remarquable travail, qu’on aurait dit écrit sous sa dictée. Elle put le signer sans hésitation, et c’est ainsi que le Publiciste se fit pendant tout le temps de sa maladie, grâce à un collaborateur aussi invisible qu’exact. On aurait pu croire que la plume de mademoiselle de Meulan, devenue fée, courait toute seule sur le papier, à la fois chargée d’encre et de pensées. Le procédé était délicat, sa forme pleine de chevalerie littéraire ; il toucha vivement mademoiselle de Meulan, il occupa beaucoup son imagination : quelle