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C’est à Belley, au collège des Pères de la foi, nom sous lequel les jésuites sont rentrés en France, que M. de Lamartine a achevé chrétiennement cette éducation si chrétiennement commencée. À la fin de ses études, il a fait un court voyage en Italie, dont les beaux lacs lui sont apparus ; puis il est venu à Paris regarder de loin les derniers jours de l’empire, car il conserve précieusement dans son cœur la fidélité politique de ses aïeux. Pendant ce rapide séjour, il a déjà entendu la voix de la poésie ; mais cette voix, trompeuse comme celle de l’écho, l’a appelé vers la tragédie. Talma s’est plus d’une fois senti ému en écoutant le jeune poëte réciter d’une voix mélancolique un chant lyrique sur Saül, composition qui aspire en vain à quitter les ailes de l’ode, pour fouler la terre comme le drame. Puis, en 1813, pour la seconde fois, M. de Lamartine a visité l’Italie ; et sa jeunesse, toujours chrétienne par la foi, mais égarée dans ses voies par les passions de son âge, en a rapporté d’harmonieux regrets, de tristes et doux souvenirs. Le sentiment dominant de la jeunesse de M. de Lamartine a été celui d’une révolte intérieure contre le joug de plomb de l’empire, plus pesant encore à la liberté de la pensée qu’à celle des actions. Il a éprouvé une horreur instinctive pour ce monde où la force matérielle triomphe, et où le matérialisme de la science et de la philosophie donne la main au matérialisme politique. La Bible, Homère, Virgile, le Tasse, Milton, Rousseau, Ossian, Bernardin de Saint-Pierre surtout, ont été ses