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cence, de calme et de paix ; Milly aux sept tilleuls, cette terre natale, qui luira toujours aux yeux et au cœur du poëte comme un de ces ports de la vie d’autant plus regrettés, que la barque, une fois sortie, n’y rentre jamais. M. de Lamartine a raconté lui-même sa première éducation toute chrétienne — « Ma mère, dit-il, avait reçu de sa mère, au lit de mort, une belle Bible de Royaumont, dans laquelle elle m’apprenait à lire quand j’étais petit enfant. Cette Bible avait des gravures de sujets sacrés à toutes les pages. Quand j’avais bien récité ma leçon, et lu à peu près sans faute la demi-page de l’Histoire sainte, ma mère découvrait la gravure, et, tenant le livre ouvert sur ses genoux, me la faisait contempler en me l’expliquant pour ma récompense… Le son argentin, affectueux, solennel et passionné de sa voix ajoutait à tout ce qu’elle disait un accent de force, de charme et d’amour qui retentit encore en ce moment à mon oreille, hélas ! après six ans de silence. » Il peindra plus tard dans ses vers[1] ce rustique séjour embelli par ses souvenirs d’enfance, et consacré par la présence de son vieux père, qui racontait à sa famille l’histoire de l’échafaud des rois ; par celle de sa mère, qui apprenait à ses enfants, autant par ses exemples que par ses leçons, la religion, la bienfaisance et la vertu, et de ses sœurs dont il croit voir encore les jeux folâtres et les blonds cheveux flottant au gré des vents.

  1. Milly, ou la terre natale ; Harmonies.