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bientôt le professeur et entreprit d’achever seul ses humanités. À douze ans, il lisait Plutarque et Tite-Live. Vers cette époque, il fut confié à un oncle qui habitait la petite propriété de la Chenaie, sur la route de Saint-Malo, tout près de Dinan ; c’est là qu’il acheva lui-même son éducation. Cet oncle l’enfermait souvent dans une bibliothèque divisée en deux compartiments, dont l’un, réservé à tous les livres hétérodoxes et dangereux, avait reçu le nom de l’enfer ; le jeune homme, à qui on avait interdit l’accès de cette partie de la bibliothèque, lut tous les ouvrages défendus mais, comme il lisait en même temps les grands écrivains religieux, qui remplissaient les autres rayons, son intelligence se trouva assez saine pour préférer l’antidote au poison. Le ciel l’emporta sur l’enfer, et il sortit de cette bibliothèque plus religieux qu’il n’y était entré. Dans cette enquête contradictoire, M. de La Mennais avait été saisi d’un grand dédain pour le philosophisme du dix-huitième siècle, et d’une ferveur d’autant plus vive, qu’elle était fondée sur une foi éprouvée par l’étude. Quand il fit sa première communion, à vingt-deux ans, sa vocation pour le sacerdoce était décidée ; en attendant le consentement de son père, qui aurait préféré lui voir adopter la carrière commerciale, il entra comme professeur de mathématiques au collège de Saint-Malo. En 1807, il publia une traduction d’un petit livre ascétique de Louis de Blois, le Guide spirituel, et l’on remarqua l’onction et la douceur de son style. En 1808, parurent les