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tient ordinairement que là où se rencontre le puissant attrait de la nouveauté. C’est qu’il enseignait l’Évangile aux premiers jours du dix-neuvième siècle ; c’est qu’il parlait d’une religion révélée, de sa morale, de ses mystères, de son culte divin, devant un auditoire qui ne pouvait se rappeler sans un profond sentiment de honte et de tristesse que les Français avaient été condamnés à assister aux fêtes de la Raison, et que naguère encore on avait entendu retentir, sous ces mêmes voûtes où dominait enfin la voix de l’orateur chrétien, les misérables chants de ce prétendu culte. »

Ainsi, ce qui contribuait au succès toujours croissant des conférences de M. Frayssinous, c’est qu’au dix-neuvième siècle le christianisme était devenu une nouveauté en France ; la plupart des jeunes gens ne connaissaient l’Évangile que par les citations tronquées de Voltaire, et le patriotisme était la seule religion qu’on leur eût enseignée. M. Frayssinous rencontrait donc, en montant dans la chaire, à peu près les mêmes conditions de succès qu’avait rencontrées M. de Chateaubriand dans la littérature. La vérité, après cette longue éclipse du bon sens, avait toutes les séductions de l’imprévu, et l’évidence elle-même se présentait avec tous les attraits du paradoxe, tant elle avait été méconnue et oubliée. On comprend que M. Frayssinous dut conformer son enseignement à l’état intellectuel et moral de son auditoire. « Les temps où nous sommes, disait-il lui-même, semblent demander un nouveau genre d’instruction. Il faut bien que le médecin appro-