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mains de l’erreur, mais elle a réformé elle-même ce qui devait être réformé. Le libre examen appliqué sans mesure à la philosophie et à la politique a produit et produira, malgré les ruines qu’il a entassées, des conséquences analogues. Quand on arrivera à la moisson, les seuls résultats qui subsisteront de ces deux mouvements d’idées, c’est la destruction des différents systèmes d’erreurs les uns par les autres, c’est la disparition des abus. Il est dans la destinée de l’erreur d’être consumée par le feu qu’elle allume. C’est ainsi que le protestantisme a été dévoré, sinon comme fait, au moins comme idée, par le socinianisme ; le déisme séparé du culte religieux par l’athéisme ou le panthéisme, qui n’est au fond que la variante de la négation de l’existence divine ; croire que Dieu n’est pas, équivaut, en effet, à croire que tout est Dieu. C’est ainsi, enfin, que le rationalisme politique, qui met l’arbitraire de la volonté d’une génération au-dessus de la tradition, des lois constitutives et essentielles des sociétés, révélées par leur histoire, aboutit au socialisme, qui, à son tour, creuse un gouffre où disparaîtraient les sociétés si on ne l’y jetait lui-même pour le combler. La vérité seule survit, parce que la vérité seule est éternelle. Son essence indestructible résiste à tous les agents de destruction ; l’erreur, qui a cru devenir sa maîtresse, n’est au fond que sa servante, et elle sert, en définitive, les desseins de Dieu, contre lesquels la raison humaine a voulu se révolter[1].

  1. Leibnitz, un des esprits les plus élevés qui aient honoré la