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luttes philosophiques de la restauration : c’étaient MM. Cousin et Jouffroy.

M. Guizot, uni à M. Royer-Collard par les liens d’une étroite et respectueuse amitié, et M. Villemain, esprit de la même famille que M. de Fontanes, auquel il devait être supérieur par l’étendue de l’érudition et la pénétration de l’esprit, étaient déjà maîtres à une époque de la vie où l’on est encore élève.

M. Royer-Collard, on s’en souvient, avait vu venir le pouvoir impérial avec défiance ; M. Guizot, quand il fut nommé par M. de Fontanes professeur d’histoire moderne, montra la même disposition d’esprit. Il était d’usage, lorsqu’un nouveau professeur montait en chaire que, dans son discours d’inauguration, il plaçât l’éloge de l’empereur : c’était une manière de prêter foi et hommage au chef de l’empire. M. de Fontanes avertit M. Guizot de cet usage, et lui apprit en outre que, la veille du jour où le discours devait être prononcé, on en plaçait une copie sur le bureau de l’empereur, qui souvent en prenait lecture ; nouveau motif pour ne pas omettre la phrase à sa louange. « Je ne la ferai pas, répondit le jeune professeur ; reprenez la chaire que vous m’avez donnée. Je n’aime pas l’empereur, je ne le louerai pas. »

M. de Fontanes répondit : — « Vous allez me susciter de nouveaux embarras ; » mais il n’insista plus. Le discours fut déposé sans phrase élogieuse. Fut-il lu par le maître ? Nul ne le sait ; mais toujours est-il que