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était que plus élégante, plus littéraire, de meilleur goût mais, au fond de tout cela, il avait des idées qu’il ne sacrifiait pas, même à celles de l’empereur, des sentiments qu’il voulait maintenir intacts, des intérêts qu’il mettait au-dessus des intérêts bonapartistes. Or, ce que l’empereur demandait, avant tout, c’est le sacrifice de toutes les idées aux siennes, de tous les intérêts aux siens, de tous les sentiments à un seul sentiment, le dévouement aveugle, inconditionnel, absolu à son pouvoir, à ses pensées, à sa personne. Sans doute la résistance de Fontanes était mesurée, convenable, obséquieuse même, telle, en effet, que le temps la comportait ; et c’est ce qui a fait illusion aux observateurs superficiels qui, entre le tumulte de la licence révolutionnaire et le bruit du régime libre de la restauration, n’ont pas voulu comprendre les ménagements infinis auxquels toute voix d’opposition était astreinte sous l’empire, par la nature des choses, et n’ont vu dans Fontanes qu’un courtisan ordinaire, parce qu’il ne disait pas, comme Mirabeau : « Nous sommes ici par la volonté du peuple, » ou qu’il n’écrivait pas un pamphlet à la manière de Paul-Louis Courrier. Il faut permettre aux hommes d’être de leur caractère et surtout de leur temps, et Tacite a écrit, sur le mélange de la modération et de la fermeté sous le despotisme, une phrase dont il faut se souvenir sans toutefois en abuser. Il y a, en politique comme en musique, un ton général, au diapason duquel sont ramenées les intonations particulières ; et les plus honnêtes