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II.

Lutte des deux écoles constatée dans l’histoire d’un journal.


On peut saisir d’une manière assez claire les alternatives de cette lutte, dans les destinées d’un journal qui eut le privilége, bien rare à cette époque, de parler quand tout le monde se taisait, et qui continua, dans une certaine mesure et avec des précautions commandées par les circonstances, le mouvement de la réaction intellectuelle dont Chateaubriand, Bonald et de Maistre avaient donné le signal. Il s’agit du Journal des Débats. C’est là qu’il faut chercher, à l’aide des documents intimes, publiés dans ces dernières années, les traces de la lutte incessante que nous avons signalée et qui, pour être moins éclatante, n’en continuait pas moins.

Jamais fortune de journal ne fut plus grande ; mais jamais aussi circonstances plus favorables ne se présentèrent et ne furent mieux mises à profit, par un concours d’écrivains aussi heureusement associés à une œuvre commune. Un des esprits les plus ingénieux de ce petit bataillon intellectuel qui fit de la critique une puissance, M. de Féletz, a exposé d’une manière trop fidèle[1] la nouveauté de cette situation, pour qu’on essaye de l’expliquer après lui. Voici ses paroles : « J’oserai dire qu’à aucune autre époque de notre litté-

  1. Discours de réception à l’Académie française.