allemands. Je tournai le tout en plaisanterie ; — si bien que je suis arrivé fort loin dans la confiance du baron de S***, qui me fournira lui-même bien des sujets d’observation. Ne sommes-nous pas aussi, nous autres écrivains, les membres d’une sorte de police morale ?…
Il finit par m’engager à venir, quand je le voudrais, lire les journaux de l’opposition à la police,… attendu que c’était l’endroit le plus libre de l’empire… On pouvait y causer de tout sans danger.
14 janvier. — Hier, le baron de S*** m’a fait mander chez lui, et m’a dit : « Amusez-vous donc à lire cette lettre. » Mon étonnement fut très-grand en reconnaissant qu’elle s’adressait à mon oncle du Périgord, et qu’elle était la copie d’une lettre de mon cousin Henri, le diplomate, qui a quitté Vienne depuis quelques jours.
Voici l’écrit :
« Mon cher oncle,
» Depuis le moment où M. le ministre des affaires étrangères a daigné, sur votre puissante recommandation, m’ouvrir enfin la carrière diplomatique, en m’attachant à l’ambassade de Suède, je puis dire qu’un nouveau jour s’est levé pour moi ! Mon esprit, agrandi par les conseils de votre expérience, demande à se déployer largement dans cette sphère, où vous avez obtenu jadis de si beaux triomphes. Quoique je doive, d’après vos conseils, me borner, quant à présent, à écrire lisiblement les dépêches, notes, mémorandum, conférences, etc., dont la copie me sera confiée, à donner des légalisations et des visas en l’absence du chancelier, à résumer des rapports, et surtout à couper des enveloppes et à former des cachets de cire d’une rondeur satisfaisante, je sens que je ne m’arrêterai pas toujours à ces préliminaires de l’art diplomatique, qui ne sont pas à négliger, sans doute, mais qui recouvrent comme d’un voile les profonds arcanes politiques auxquels je brûle d’être bientôt initié.