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VOYAGE EN ORIENT.

teau, qui retombe avec fracas sur le crâne d’Adoniram. L’artiste chancelle étourdi ; par un mouvement instinctif, il cherche une issue à la seconde porte, celle du Septentrion. Là se trouvait le Syrien Phanor, qui lui dit :

— Si tu veux sortir, livre-moi le mot de passe des maîtres !

— Tu n’as pas sept années de campagne ! répliqua d’une voix éteinte Adoniram.

— Le mot de passe !

— Jamais !

Phanor, le maçon, lui enfonça son ciseau dans le flanc ; mais il ne put redoubler, car l’architecte du temple, réveillé par la douleur, vola comme un trait jusqu’à la porte d’Orient, pour échapper à ses assassins.

C’est là qu’Amrou le Phénicien, compagnon parmi les charpentiers, l’attendait pour lui crier à son tour :

— Si tu veux passer, livre-moi le mot de passe des maîtres !

— Ce n’est pas ainsi que je l’ai gagné, articula avec peine Adoniram épuisé ; demande-le à celui qui t’envoie.

Comme il s’efforçait de s’ouvrir un passage, Amrou lui plongea dans le cœur la pointe de son compas.

C’est en ce moment que l’orage éclata, signalé par un grand coup de tonnerre.

Adoniram était gisant sur le pavé, et son corps couvrait trois dalles. À ses pieds s’étaient réunis les meurtriers, se tenant par la main.

— Cet homme était grand, murmura Phanor.

— Il n’occupera pas dans la tombe un plus vaste espace que toi, dit Amrou.

— Que son sang retombe sur Soliman-Ben-Daoud !

— Gémissons sur nous-mêmes, répliqua Méthousaël ; nous possédons le secret du roi. Anéantissons la preuve du meurtre ; la pluie tombe ; la nuit est sans clarté ; Éblis nous protège. Entraînons ces restes loin de la ville, et confions-les à la terre.

Ils enveloppèrent donc le corps dans un long tablier de peau