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moi par la Suisse ; c’est à Francfort seulement que nous devions nous rencontrer, pour y résider quelque temps et revenir ensemble. Mais, comme sa tournée était plus longue que la mienne, vu qu’on lui faisait fête partout, que les rois le voulaient voir, et qu’on avait besoin de sa présence au jubilé de Malines, qui se célébrait à cette époque, je crus prudent d’attendre à Bade que les journaux vinssent m’avertir de son arrivée à Francfort. Une lettre chargée devait nous parvenir à tous deux dans cette dernière ville. Je lui écrivis de m’en envoyer ma part à Bade, où je restais encore. Ici vous allez voir un coin des tribulations de voyage. Les banquiers ne veulent pas se charger d’envoyer une somme au-dessous de 500 francs en pays étranger, à moins d’arrangements pris d’avance. À quoi vous direz qu’il est fort simple de se faire ouvrir un crédit sur tous les correspondants de son banquier ; à quoi je répondrai que cela n’est pas toujours si simple qu’il le paraît. Le prince Puckler-Muskau dirait comme moi, qui ne suis que littérateur, s’il osait avoir cette franchise. Aussi bien je pourrais inventer mille excuses ; j’étais alors à Baden-Baden, et l’année justement de l’ouverture des jeux Bénazet ; je pourrais avoir risqué quelques centaines de louis à la table où l’électeur de Hesse jetait tous les jours 25 000 francs ; je pourrais, ayant gagné, avoir été dévalisé dans la Forêt-Noire par quelque ancien habitué de Frascati,