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de ces eaux, où dorment les lourds bateaux à voiles qui de temps en temps se réveillent pour faire le grand voyage des Indes.

V. — Het Rembrants Feest.

Ô Érasme ! — dont je porte humblement le nom traduit du grec, — inspire-moi les termes choisis et nécessaires pour rendre l’impression que m’a causée Amsterdam au retour. Les lumières étincelaient comme les étoiles dorées dont parlent les ballades allemandes. Toi qui as fait l’éloge de la folie, tu comprendras le ravissement que j’ai éprouvé en voyant toute la ville en fête à la veille de l’érection officielle de la statue de Rembrandt. Le gouvernement n’accordait qu’un jour, mais le peuple en voulait au moins trois. On se réjouissait d’avance dans les gastoffs et dans les musicos. J’ai trouvé à la porte d’un de ces derniers une femme qui représentait très sincèrement l’image de la Folie dont Holbein a orné tes pages savantes. C’était encore, si l’on veut, « Calliope longue et pure, » charmant de ses accords la foule assemblée dans un carrefour. Son violon, poudré au milieu par la colophane, exécutait des airs anciens d’un mauvais goût sublime. En me voyant, cette femme eut l’intuition de ma nationalité, et joua aussitôt la Marseillaise. La foule sympathique répétait le chœur en langue flamande. —