Page:Nerval - Lorely, 1852.djvu/355

Cette page a été validée par deux contributeurs.

au-dessus desquels se dressent, sur trois ou quatre points, de hauts clochers ouvragés comme les pions d’un échiquier chinois. Puis le panorama s’abaisse ; chaque dôme, chaque flèche fait le plongeon à son tour. Seule, la vieille cathédrale, située à gauche, lève toujours son doigt de pierre, dont on aperçoit la dernière aiguille de l’autre côté du golfe. L’étendue de la mer est vaste ; cependant une ligne verte égayée de moulins trace partout, comme un mince ourlet, les derniers contours de l’horizon. On finit par reconnaître l’autre rivage en voyant s’y multiplier les moulins, qui autour de Saardam sont au nombre de quatre cents. Une petite anse ouverte au milieu des pâturages à fleur d’eau vous mène au port de la charmante ville, — que je me garderai bien d’appeler chinoise, parce que cela déplaît aux habitants. Voici le cadran d’une jolie église au toit pointu qui nous annonce que nous n’avons mis qu’une heure pour la traversée. Une nuée de cicerone en bas âge s’attache à nos vêtements avec l’âpreté des Frisonnes de La Haye, mais avec des moyens de séduction moins infaillibles.

J’ai été obligé de me réfugier dans un café pour n’être pas mis en lambeaux. Un homme très poli est venu s’asseoir à ma table, et a demandé un verre de bière. En causant, il m’a parlé de la maison de Pierre le Grand, et a offert de m’y conduire. Les petits cicerone hurlaient tellement à la