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les balancements de vagues que peut créer l’union du triton et de la sirène. Des familles anglaises viennent voir cela par curiosité, car il y a des estrades consacrées aux bourgeois, où l’on ne voit naturellement s’attabler que des étrangers.

Le lendemain matin, j’étais à bord du paquebot Amicitia, qui, tous les jours, fait le trajet d’Anvers à Rotterdam en huit heures. Les armes des deux villes décorent le bastingage. Les mains coupées du géant d’Anvers se tendent affectueusement comme pour caresser les quatre lions de gueule et de sable de l’écusson néerlandais. On n’a rien de mieux à faire alors que de s’attabler pour plusieurs heures dans la cajute avec la certitude d’échapper aux prescriptions sévères du vendredi belge. La viande protestante s’étale sous toutes les formes, et, toujours trop peu cuite pour nous, inonde de son sang les pommes de terre de Dordrecht. On laisse à gauche Flessingue, à droite Berg-op-Zoom en fredonnant la vieille chanson française : C’ti-là qu’a pincé Berg-op-Zoom, et l’on se fatigue peu à peu de ces méandres de bras de mer et d’embouchures de fleuves qui découpent la Zélande en guipures. À la hauteur d’un certain fort qui doit s’appeler Loo, le pavillon belge nous avait salués une dernière fois, — puis nous avions retrouvé nos couleurs françaises, disposées en longueur et non plus en largeur. — Les douaniers des Pays-Bas inspectent les