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SCÈNES DE LA VIE ALLEMANDE.

diégo. Je ne me cachais pas : je méditais.

deuxième soldat. Il dégradait les monuments publics.

l’officier. Qu’est-ce enfin, et de quoi s’agit-il ?

premier soldat. Vous savez bien, mon commandant, ce guerrier d’autrefois, habillé en Romain, sur la terrasse du midi : cet homme s’en est approché en faisant de grands gestes, comme s’il jouait la tragédie. J’étais en faction ; je n’ai rien dit ; la consigne ne défend pas aux bourgeois de causer avec les statues.

diégo. Eh ! je ne suis pas un bourgeois !

l’officier. Est-ce tout ?

premier soldat. Non, mon commandant ; alors j’ai fait semblant de tourner le dos, alors le bourgeois s’est mis à graver quelque chose sur le piédestal.

l’officier. Qu’a-t-il écrit ?

premier soldat. Rien : des mots sans suite. Il a gâté le marbre, voilà tout ; d’ailleurs, je ne sais pas lire.

l’officier (à l’autre). Qu’a-t-il écrit.

deuxième soldat. Il a écrit : « Tu dors, Brute. »

premier soldat. Voyez-vous ? mon commandant, des injures à un factionnaire ! Oh ! que non, je ne donnais pas, bourgeois.

diégo. Ignorant ! qui prend pour lui un souvenir de l’antiquité, une citation latine… Mais vous connaissez cela, vous, commandant ?