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— Et j’ai retrouvé l’abbé de Bucquoy.

— Parlez-en.

Je ne fais pas autre chose depuis un mois. Les lecteurs doivent être déjà fatigués du comte du Bucquoy le ligueur, plus tard généralissime des armées d’Autriche ; — de M. de Longueval de Bucquoy et de sa fille Angélique, enlevée par La Corbinière ; — du château de cette famille, dont je viens de fouler les ruines…

Et enfin de l’abbé comte de Bucquoy lui-même, dont j’ai rapporté une courte biographie, — et que M. d’Argenson, dans sa correspondance, appelle le prétendu abbé de Bucquoy.

Il est en ainsi peut-être des faux saulniers. On n’y croit plus ! Les faux saulniers ne pouvaient pas être de vrais saulniers. Les mémoires du temps orthographient ainsi leur nom : fauxçonniers. C’étaient simplement les gens qui faisaient la contrebande du sel non-seulement en Franche-Comté, en Lorraine, en Bourgogne, mais en Champagne, en Picardie, en Bretagne, partout. Saint-Simon raconte à plusieurs reprises leurs exploits, et cite même de certains régiments qui faisaient le faux saunage lorsque la paye devenait trop irrégulière, soit sous Louis XIV, soit sous la Régence. Mandrin fut, plus tard encore, un capitaine de faux saulniers. Un simple brigand eût-il pu prendre des villes et livrer des batailles rangées ?… Mais, par l’histoire qui se faisait alors, on devait avoir intérêt à embrouiller cette question immense de la résistance aux gabelles, qui fut une des principales causes de mécontentement populaire. Les paysans ont toujours considéré l’impôt du sel comme une question de subsistances et une des plus lourdes charges du cultivateur.

Le livre que je viens d’acheter à la vente Motteley vaudrait beaucoup plus de soixante-neuf francs vingt centimes, s’il n’était cruellement rogné. La reliure, toute neuve, porte en lettres d’or ce titre attrayant : Histoire du sieur abbé comte de Bucquoy, etc. La valeur de l’in-12 vient peut-être de trois