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de Soissons à Reims m’a conduit à Braine. Une heure après, j’ai pu gagner Longueval, le berceau des Bucquoy. Voilà donc le séjour de la belle Angélique et le château chef de son père, qui paraît en avoir eu autant que son aïeul, le grand comte de Bucquoy, a pu en conquérir dans les guerres de Bohème. — Les tours sont rasées, comme à Dammartin. Cependant, les souterrains existent encore. L’emplacement, qui domine le village, situé dans une gorge allongée, a été couvert de constructions depuis sept ou huit ans, époque les ruines ont été vendues. Empreint suffisamment de ces souvenirs de localité qui peuvent donner de l’attrait à une composition romanesque, et qui ne sont pas inutiles au point de vue positif de l’histoire, j’ai gagné Château-Thierry, où l’on aime à saluer la statue rêveuse du bon la Fontaine, placée au bord de la Marne et en vue du chemin de fer de Strasbourg.


Réflexions.


Et puis… (C’est ainsi que Diderot commençait un conte, me dira-t-on.)

— Allez toujours !

— Vous avez imité Diderot lui-même.

— Qui avait imité Sterne.

— Lequel avait imité Swift.

— Qui avait imité Rabelais.

— Lequel avait imité Merlin Coccaie.

— Qui avait imité Pétrone.

— Lequel avait imité Lucien. Et Lucien en avait imité bien d’autres. Quand ce ne serait que l’auteur de l’Odyssée, qui fait promener son héros pendant dix ans autour de la Méditerranée, pour l’amener enfin à cette fabuleuse Ithaque, dont la reine, entourée d’une cinquantaine de prétendants, défaisait chaque nuit ce qu’elle avait tissé le jour.

— Mais Ulysse a fini par retrouver Ithaque.