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qui est parvenu à la séduire. Sur le bord du ruisseau, tous deux raisonnent sur le sort de l’enfant probable qui sera le résultat de leur amour. — Le seigneur dit :


En ferons-nous un prêtre, — Ou bien un président ?


On sent bien ici qu’il est impossible de faire autre chose d’un enfant produit, à cette époque, dans de telles conditions. Mais la jeune fille a du cœur, malgré son imprudence, et, renonçant pour son fils aux avantages d’une position mixte, elle répond :


Nous n’en ferons un prêtre, — Non plus un président. — Nous lui mettrons la hotte, — Et trois oignons dedans.
Il s’en ira criant : « Qui veut mes oignons blancs ? » — Allons, ma mie, légèrement ! — Légèrement, légèrement !


En voilà encore une qui ne sera pas recueillie par le comité des chants nationaux, et cependant qu’elle est jolie ! Elle peint même les mœurs d’une époque. — Il n’en est pas de même de celle-ci, qui ne décrit que des mœurs générales :


Ah ! qu’y fait donc bon ! — Qu’y fait donc bon —
Garder les vaches — Dans l’paquis aux bœufs, — Quand
on est deux. — Quand on est quatre, — On s’embarrasse.
— Quand on est deux, — Ça vaut bien mieux !


Qu’elle est nature, celle-là, et que c’est bien la chanson d’un berger !… Mais on la connaît par les Mémoires de Dumas ; — c’est, en effet, une chanson des environs de Villers-Cotterets, où il a été élevé.

Citons pourtant les vers que dit le berger à la jeune Isabeau :


Ton p’tit mollet rond — Passe sous ton jupon… —
T’as quinze ans passés. — On le voit bien assez !


C’est de l’idylle antique, et l’air est charmant.