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LES SUCCESSEURS D’ICARE


Dædalus interea Creten, longumque perosus
Exilium, tactusque soli natalis amore,
Clausus erat pelago. — Terras licet, inquit, et undas
Obstruat ; at certe cælum patet : ibimus illac…


C’est en ces termes qu’Ovide commençait l’histoire de la première tentative qui, selon lui, avait été faite pour s’élever dans les airs. Dédale et son fils, après avoir bâti le labyrinthe, s’ennuyèrent dans l’île de Crète, dont le roi voulait les retenir, et, se voyant séparés par la mer de la Sicile, leur pays natal, se dirent : « La terre et les ondes s’opposent à notre passage… mais le ciel est ouvert : nous irons par ce chemin ! »

Est-ce bien là l’origine véritable de l’aérostation ? La Bible nous apprend qu’Élie s’éleva au ciel sur un char de feu ; mais ceci doit être considéré comme un miracle. Remontons au déluge. On sait que, dans les derniers temps qui le précédèrent, les enfants de Tubal-Caïn avaient fait tant de découvertes prodigieuses, qu’ils étaient devenus pareils à des dieux (éloïm). M. de Lamartine, d’après une légende du Talmud, consacre de beaux vers à une certaine invention qui se rapproche beaucoup de celle qui nous occupe.

Il est inutile de citer le passage. M. de Lamartine a décrit en vingt alexandrins un appareil composé d’un vaste soufflet soutenu par un aérostat, et qui, par un mécanisme d’aspiration et d’expiration, souffle dans une voile qui fait marcher le tout contre le