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sur la terre ? Le soleil est fait pour la lune, il darde sur elle ses rayons, stimule par eux ce qu’il y a en elle de lumineux, et ainsi elle nous éclaire ; la lune est faite pour le soleil, elle ouvre son sein pour recevoir ses rayons et ses influences qu’elle nous verse ; tous les astres sont faits les uns pour les autres, tous reçoivent les uns des autres, et dans une contrariété de mouvements, formant une harmonie universelle, ils entretiennent partout le mouvement et la vie. Quand tout a un but dans la nature, n’est-il pas insensé de penser que le séjour de l’homme sur la terre est sans but ?

« Puisque le mal n’est pas l’ouvrage du principe, qu’ainsi il n’est inhérent à aucun être, et puisque nous sentons l’ardeur du bien, toute notre tâche sur la terre doit être notre régénération, et si le mal nous a éloignés du principe qui ne peut l’admettre en lui, tout notre but doit être, par cette régénération, notre réunion à notre principe : telle est toute la tâche religieuse que nous avons à remplir sur la terre. J’ai dit plus haut comment les bêtes, n’ayant pas admis le mal, ressentent les effets du mal. Il y a d’autres êtres qui ressentent les effets du mal ; mais, pour que je pusse vous en parler, il faudrait que je pusse parler la langue des dieux que je ne sais point parler, et que vous sauriez moins entendre.

» Cherchons donc les moyens de cette régénération ; ils sont universels et les mêmes dans toutes les nations. Le consentement unanime de toutes les nations a été pour les plus grands philosophes de l’antiquité une preuve certaine de vérité : en effet, une idée générale de tous les hommes ne peut être une erreur, ou leur principe les aurait faits pour l’erreur, ce qui ne peut se supposer ; d’où il suit que les moyens de cette régénération étant universels et les mêmes dans toutes les nations, ou ont été enseignés à toutes les nations par la Divinité, ou sont une production naturelle de l’esprit humain, et dans l’un ou l’autre cas astreignent tous les hommes à les employer, et qu’un particulier qui décline de cette instruction universelle, ou de cette conception naturelle, se crée une solitude et se creuse un précipice et un gouffre de perdition.