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ne doit jamais attaquer un culte établi qu’avec prudence et avec une certaine délicatesse, de peur qu’un changement subit et violent ne paraisse une atteinte portée à la morale et une dispense de la probité même. Au reste, celui qui peut remplacer la Divinité dans le système de la vie sociale est à mes yeux un prodige de génie, celui qui sans l’avoir remplacée ne songe qu’à la bannir de l’esprit des hommes me paraît un prodige de stupidité ou de perversité.

Il faut reconnaître aussi parmi les détails de la cérémonie qu’il institua en l’honneur de l’Être suprême, un ressouvenir des pratiques de l’illuminisme dans cette statue couverte d’un voile auquel il mit le feu et qui représentait soit la Nature, soit Isis.

Robespierre une fois renversé, bien des philosophes cherchaient toujours à établir une formule religieuse en dehors des idées catholiques. Ce fut alors que Dupont (de Nemours), le célèbre économiste, l’ami de Lavoisier, publia sa Philosophie de l’Univers, où l’on trouve un système complet sur la hiérarchie des esprits célestes, lequel remonte évidemment à l’illuminisme et aux doctrines de Swedenborg. Aucler, dont nous allons parler, alla plus loin encore en proposant de rétablir le paganisme et l’adoration des astres.

Restif de la Bretonne a publié aussi, comme nous l’avons vu, un système de panthéisme qui supprimait l’immortalité de l’âme, mais qui la remplaçait par une sorte de métempsycose. — Le père devait renaître dans sa race au bout d’un certain nombre d’années. La morale de l’auteur était fondée sur la réversibilité, c’est-à-dire sur une fatalité qui amenait forcément dans cette vie même la récompense des vertus ou la punition des fautes. Il y a dans ce système quelque chose de la doctrine primitive des Hébreux.