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listes de l’Orient. Les génies lumineux, soumis à Salomon, livrent force combats à ceux de la suite d’Eblis ; les talismans, les conjurations, les anneaux constellés, les miroirs magiques, tout cet enchevêtrement merveilleux des fatalistes arabes s’y noue et s’y dénoue avec ordre et clarté. Le héros a quelques traits de l’initié égyptien du roman de Séthos, qui, alors, obtenait un succès prodigieux. Le passage où il franchit, à travers mille dangers, la montagne de Caf, palais éternel de Salomon, roi des génies, est la version asiatique des épreuves d’Isis ; ainsi, la préoccupation des mêmes idées apparaît encore sous les formes les plus diverses.

Ce n’est pas à dire qu’un grand nombre des ouvrages de Cazotte n’appartienne à la littérature ordinaire. Il eut quelque réputation comme fabuliste, et, dans la dédicace qu’il fit de son volume de fables à l’Académie de Dijon, il eut soin de rappeler le souvenir d’un de ses aïeux, qui, du temps de Marot et de Ronsard, avait contribué aux progrès de la poésie française. À l’époque où Voltaire publiait son poëme intitulé la Guerre de Genève, Cazotte eut l’idée plaisante d’ajouter aux premiers chants du poëme inachevé un septième chant écrit dans le même style, et que l’on crut de Voltaire lui-même.

Nous n’avons pas parlé de ses chansons, qui portent l’empreinte d’un esprit tout particulier. Rappellerons-nous la plus connue, intitulée Ô mai ! joli mois de mai :

Pour le premier jour de mai,
Soyez bien réveillée !
Je vous apporte un bouquet,
Tout de giroflée ;
Un bouquet cueilli tout frais,
Tout plein de rosée.


Tout continue sur ce ton. C’est une délicieuse peinture d’éventail, qui se déploie avec les grâces naïves et maniérées tout à la fois du bon vieux temps.

Pourquoi ne citerions-nous pas encore la charmante ronde