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— Je voudrais bien, dit l’abbé, me trouver de nouveau avec le baron de Peken. J’avais entrepris la conversion de ce luthérien, et, mon esprit se tournant vers les choses saintes à cause de la maladie dont Dieu m’a frappé, je serais heureux d’accomplir cette œuvre.

Corbé donna des ordres, et l’abbé se vit transporté à une chambre du second étage dans la tour de la Bretaudière, où le baron de Peken se trouvait depuis quelques jours en compagnie d’un Irlandais.

L’abbé continua à faire le paralytique, même devant ses compagnons, car ce qui était arrivé à la tour du Coin l’avait instruit du danger de trop de franchise. L’Allemand vivait en mauvaise intelligence avec l’Irlandais. Ce compagnon ne tarda pas à déplaire aussi à l’abbé. Mais le baron de Peken, plus irritable, insulta l’Irlandais de telle sorte qu’un duel fut résolu.

On sépara une paire de ciseaux, dont les deux parties, bien aiguisées, furent adaptées à des bâtons et le duel commença dans les règles. L’abbé de Bucquoy, qui croyait d’abord que ce ne serait qu’une plaisanterie, voyant l’affaire s’engager chaudement et le sang couler, se mit à frapper contre la porte, ce qui était le moyen de faire venir le porte-clefs.

Interrogé sur cette affaire, il donna tort à l’Irlandais, qui fut mis à part, et resta seul avec le baron. Alors, il lui fit confidence d’un projet d’évasion mieux conçu que l’autre, et qui consistait à trouer une muraille communiquant à un lieu assez fétide, mais d’où, par une longue percée, on descendait naturellement dans les fossés du côté de la rue Saint-Antoine.

Ils se mirent à travailler tous deux avec ardeur, et le mur était déjà entièrement troué… Malheureusement, le baron de Peken était vantard et indiscret. Il avait trouvé