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rois, et qui sont toujours soupçonnés de rébellion. Je n’appartiens pas aux protestants, mais je suis pour ceux qui protestent contre la monarchie absolue et contre les abus qu’elle entraîne… Ma famille avait fait de moi un prêtre ; j’ai jeté le froc aux orties et je me suis rendu libre. Combien êtes-vous ?

— Six mille, dit le capitaine.

— J’ai servi déjà quelque temps… J’ai cherché même à lever un régiment depuis que j’ai abandonné la vie religieuse… Mais les dépenses qu’avait faites feu mon oncle m’ont gêné dans certaines ressources que j’attendais de ma famille… M. de Louvois nous a causé de grands chagrins !

— Cher seigneur, dit le capitaine, vous me paraissez être un brave… Tout peut se réparer encore : — Votre demeure à Paris ?

— Je compte descendre chez ma tante, la comtesse douairière de Bucquoy.

Un des assistants se leva, et dit à des gens qui se trouvaient à la même table : « C’est celui que nous cherchons. » Cet homme était connu pour un recors ; il sortit et alla quérir un exempt de la maréchaussée.

Au moment où Archambault de Bucquoy, averti par son domestique, regagnait sa voiture, l’exempt, accompagné de six gendarmes, voulut l’arrêter. Les gens du cabaret sortirent et cherchèrent à s’y opposer. Il voulut se servir de ses pistolets, mais la maréchaussée avait reçu des renforts.

On fit remonter le voyageur dans sa voiture entre deux exempts ; les gendarmes suivaient. On arriva bientôt à Sens. Le prévôt interrogea d’abord tout le monde avec impartialité, puis il dit au voyageur :

— Vous êtes l’abbé de La Bourlie ?