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le culte extérieur des dieux par une doctrine spiritualiste dérivée des mystères d’Éleusis et des initiations égyptiennes, — il fallait encore que l’Église poursuivît sa victoire dans toutes les localités imprégnées des superstitions antiques, — et la persécution ne fut pas si puissante que le temps et l’oubli pour ce résultat difficile.

À ne nous occuper que de la France seulement, nous reconnaîtrons que le culte païen survécut longtemps aux conversions officielles opérées par le changement de religion des rois mérovingiens. Le respect des peuples pour certains endroits consacrés, pour les ruines des temples et pour les débris mêmes des statues, obligea les prêtres chrétiens à bâtir la plupart des églises sur l’emplacement des anciens édifices païens. Partout où l’on négligea cette précaution, et notamment dans les lieux solitaires, le culte ancien continua, — comme au mont Saint-Bernard, où, au siècle dernier, on honorait encore le dieu Jou sur la place de l’ancien temple de Jupiter. Bien que l’ancienne déesse des Parisiens, Isis, eût été remplacée par sainte Geneviève, comme protectrice et patronne, — on vit encore, au xie siècle, une image d’Isis, conservée par mégarde sous le porche de Saint-Germain-des-Prés, honorée pieusement par des femmes de mariniers, — ce qui obligea l’archevêque de Paris à la faire réduire en poudre et jeter dans la Seine. Une statue de la même divinité se voyait encore à Quenpilly, en Bretagne, il y a quelques années, et recevait les hommages de la population. Dans une partie de l’Alsace et de la Franche-Comté, on a conservé un culte pour les Mères, — dont les figures en bas-reliefs se trouvent sur plusieurs monuments, et qui ne sont autres que les grandes déesses Cybèle, Cérès et Vesta.