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de 1750, qui remonte aux illustres épicuriens du siècle de Louis XIV directement, et que l’on retrouve tout entière dans le Système de la Nature. Nous n’avons voulu que marquer la base sur laquelle s’est fondé tout le système de l’auteur du Pornographe. Quant à lui-même, il n’a accepté que sous bénéfice d’inventaire les idées de Gaudet d’Arras. Ce matérialisme absolu lui répugnait, et il s’applaudit d’avoir trouvé dans un autre ami, son camarade d’imprimerie, le bon Loiseau, un caractère tout spiritualiste à opposer aux sentiments épicuriens du cordelier. Toutefois, entre Gaudet et Loiseau, il y avait une moyenne à prendre. Loiseau, quoique philosophe, croyait au Dieu rémunérateur et même à des anges ou esprits, acolytes divins, dont le célèbre Dupont de Nemours a voulu depuis prouver l’existence, en dehors de toute tradition religieuse. L’aridité du naturalisme primitif se trouvait ainsi corrigée par certaines tendances mystiques où tombèrent plus tard Pernetty, d’Argens, Delille de Salles, d’Espréménil et Saint-Martin. Si étranges que puissent sembler aujourd’hui ces variations de l’esprit philosophique, elles suivent exactement la même marche que dans l’antiquité romaine, où le néo-platonisme d’Alexandrie succéda à l’école des épicuriens et des stoïciens du siècle d’Auguste.

Quelque faible que puisse être la valeur des idées philosophiques de monsieur Nicolas, il était impossible de ne pas les indiquer dans l’appréciation de ses œuvres littéraires, car Restif est de ces auteurs qui n’écrivent pas une ligne, vers ou prose, roman ou drame, sans la nouer par quelque fil à la synthèse universelle. La prétention à l’analyse des caractères et à la critique des mœurs s’était manifestée déjà dans les trois ou quatre romans obscurs qui précédèrent le Pornographe ; à dater de ce livre, les