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rapporter la scène dont il avait été témoin. Le lendemain matin, Nicolas étant plus calme que la veille, il crut pouvoir lui dire une partie de la vérité. Ce dernier ne ménagea plus rien, et courut chez la marchande de modes. « Venez donc, lui dit cette femme, je sais bien qui vous êtes… Montez près d’elle : c’est vous qu’elle demande à grands cris. »

Zéfire était accablée et souffrante, mais calme ; elle affecta de paraître seulement fatiguée des émotions de la veille ; elle dit à Nicolas qu’il devait se rendre à son imprimerie et la laisser reposer, puis elle l’embrassa deux fois en lui disant : « À ce soir. » Tous les ouvriers s’étonnèrent de la pâleur de Nicolas. A huit heures, Loiseau lui dit : « Mangeons un morceau, puis j’irai prendre Zoé pour aller voir Zéfire. Tu ne te montreras pas tout d’abord, afin de ne pas l’agiter ; ta pâleur lui donnerait de l’inquiétude. » Il ne se montra pas en effet, mais il l’entendit parler de la chambre voisine. Loiseau lui dit : « Va te reposer, elle est mieux : c’est toi qui m’inquiètes… »

Nicolas, en s’éveillant, fut étonné de ne pas trouver son ami ; le fruitier lui dit qu’il avait passé la nuit dehors. Il courut à l’imprimerie. Loiseau travaillait à sa casse : « Et Zéfire ? — Zoé et moi, nous avons passé la nuit près d’elle. — Oh Dieu ! sans moi ! — Ta vue aurait redoublé sa fièvre. — Comment va-t-elle ? — Beaucoup mieux. » Loiseau rougissait en disant ces dernières paroles. Il essaya d’amuser l’inquiétude de Nicolas en lui parlant d’un travail pressé ; mais, après quelques hésitations, ce dernier prit son habit et courut au magasin. Loiseau le suivit et arriva sur ses pas. Zéfire étouffait, cependant elle prit la main de son amant, essaya de sourire, et dit : « Ce n’est rien. » Celui-ci ne voulut plus la quitter. Le soir, pendant que Zoé se reposait sur un canapé, Zéfire fit signe à