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LA BOHEME GALANTE

qu’elle, avait répondu, par une lettre fort polie, à l’invitation collective que nous leur avions adressée. Comme il était impossible de dormir dans ces vieilles maisons, à cause des suites chorégraphiques de nos soupers, — munis du silence complaisant des autorités voisines, — nous invitions tous les locataires distingués de l’impasse, et nous avions une collection d’attachés d’ambassades, en habits bleus à boutons d’or, de jeunes conseillers d’État[1], de référendaires en herbe, dont la nichée d’hommes déjà sérieux, mais encore aimables, se développait dans ce pâté de maisons, en vue des Tuileries et des ministères voisins. Ils n’étaient reçus qu’à condition d’amener des femmes du monde, protégées, si elles y tenaient, par des dominos et des loups.

Les propriétaires et les concierges étaient seuls condamnés à un sommeil troublé — par les accords d’un orchestre de guinguette choisi à dessein, et par les bonds éperdus d’un galop monstre, qui, de la salle aux escaliers et des escaliers à l’impasse, allait aboutir nécessairement à une petite place entourée d’arbres, — où un cabaret s’était abrité sous les ruines imposantes de la chapelle du Doyenné. Au clair de lune, on admirait encore les restes de la vaste coupole italienne qui s’était écroulée, au dix-septième siècle, sur les onze malheureux chanoines, — accident duquel le cardinal Mazarin fut un instant soupçonné.

Mais vous me demanderez d’expliquer encore, en pâle prose, ces quatre vers de votre pièce intitulée : Vingt ans.

D’où vous vient, ô Gérard ! cet air académique ?
Est-ce que les beaux yeux de l’ Opéra-Comique

  1. L’un d’eux s’appelait Van Daël, jeune homme charmant, mais dont le nom a porté malheur à notre château.