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Or, Rapin, quant à mol, jo n’ai point tant d’esprit.
Je vais le grand chemin que mon oncle m’apprit,
Laissant là ces docteurs que les muses instruisent
En des arts tout nouveaux : et, s’ils font, comme ils disent
De ses fautes un livre aussi gros que le sien,
Telles je les croirai quand ils auront du bien,
Et que leur belle muse, à mordre si cuisante,
Leur don’ra, comme à lui, dix mille escus de rente,
De l’honneur, de l’estime, et quand par l’univers
Sur le lut de David on chantera leurs vers.
O débile raison i où est ores ta bride ?
Où ce flambeau qui sert aux personnes de guide ?
Contre la passion.trop foible est ton secours,
Et souvent, courtisane, après elle tu cours ;
Et, savourant l’appât que ton âm’j ensorcelle,
Tu ne vis qu’à son goust, et ne vis que par elle.
De là vient qu’un chascun, mesmes en son deffaut,
Pense avoir do l’esprit-plus qu’il rie lui eh faut.
Aussi rien n’est parti si bien par la nature
Que le sens ; c^r chacun en a sa fourniture.
Mais pour nous, moins hardis à crohVà nos "raisons,
Qui réglons nos esprits par les comparaisons
D’Une choSë àvèc’q’ l’autre, eépluchohs de la vie
L’action qui doit estre ou blasmée ou suivie ;
Qui criblons lé discours, au choix se variant ;
D’avecq la fausseté la vérité triant ;