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Et voyant qu’un beau feu leur oervelle n’embrase,
Ils attifent leurs mots, enjolivent leur phrase,
Affectent leur discours tout si relevé d’art,
Et peignent leurs défauts de couleurs et de fard.
Aussi je les compare à ces femmes jolies
Qui par les affiquets se rendent embellies,
Qui, gentes en habits, et fades en façons,
Parmi leur point coupé tendent leurs hameçons ;
Dont l’œil rit mollement avec afféterie,
Et de qui le parler n’est rien que flatterie ;
De rubans piolez s’agencent proprement,
Et toute leur beauté ne gist qu’en l’ornement ;
Leur visage reluit de ceruse et de pautre ;
Propres en leur coiffure un poil ne passe l’autre.
Mais les divins esprits, hautains et relevez,
Qui des eaux d’Hélicon ont les sens abreuvez ;
Ne sont tels : de chaleur leur ouvrage étincelle,
De leurs vers tout divins la grâce est naturelle :
Et c’est, comme on le voit, latparfaicte beauté,
Qui, contente de s,oi, laisse la nouveauté
Quel’art trouve au palais ou dans léblanc-d’Espagne :
Rien que le naturel sa grâce n’accompagne ;
Son ftxmt, lavé d’eau ;claire, esclate d’un beau teint,
De roses et de lys,la nature l’a peint ;
Et laissant là Mercure,qt toutes ses malices,
Les nonchalances sont ses plus grands artifice .