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SONNET.


Vous avez beau croupir en l’humaine carrière,
Le temps de vostre mort vous ne diminuerez ;
Mais aussi longuement endormis vous serez
Que si vous estiez morts en voyant la lumière.

Là où finit la vie, elle est toujours entière ;
Ce que du temps futur mourant vous laisserez,
N’estoit non plus à vous, que les ans expirez
Avant d’être conceus au sein de votre mère.

Nul meurt avant son jour ; peut-estre au mesme temps
Que vous rendez l’esprit, mille autres moins contents
Ressentent de la mort l’homicide rudesse.

N’estimeriez vous pas les pèlerins bien fous
D’aller sans aucun but ? chétifs, et pensiez-vous
N’arriver jamais là où vous couriez sans cesse.