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Le couard au contraire, enlaidy d’une honte,
Ne sera rien sinon un populaire conte,
Et peut estre banny de son païs natif,
Pour sa couardeté, vagabond, fugitif,
Portant ses fils au col, d’huis en huis ira querre
Son misérable pain en quelque estrange terre,
Et de haillons vestu, et privé de bonheur,
N’osera plus hanter les gens dignes d’honneur ;
Et sa race à jamais, fust-elle décorée
De noble bisayeux, sera deshonorée.

Pour ce, faites-vous preux : bien qu’ soit ordonné
Du naturel destin que tout ce qui est né
Vestu d’os et de nerfs, soit quelque jour la proye
De la mort mange-tout, et que, mesmes à Troye
Achille et Sarpédon, enfans de dieux, n’ont pas,
Non plus que fit Thersite, évité le trespas.

Mourons, amis, mourons ! Il vaut mieux, pour défendre
Nous et nostre païs l’ame vaillante rendre,
L’âme vaillante rendre au dessus du rempart,
D’un grand coup de canon faussez de part en part,
Ou d’un grand coup de pique accourcir nostre vie,
Que languir vieux au lit, mattez de maladie.

Courage donc, soldats ! Ne craignez point la mort !
La mort ne peut tuer l’homme vaillant et fort ;