Page:Nerval - Aurélia, Lachenal & Ritter, 1985.djvu/46

Cette page a été validée par deux contributeurs.

parterres et les arbres devenaient les rosaces et les festons de ses vêtements ; tandis que sa figure et ses bras imprimaient leurs contours aux nuages pourprés du ciel. Je la perdais ainsi de vue à mesure qu’elle se transfigurait, car elle semblait s’évanouir dans sa propre grandeur. « Oh ! ne fuis pas ! m’écriai-je… car la nature meurt avec toi ! »

Disant ces mots, je marchais péniblement à travers les ronces, comme pour saisir l’ombre agrandie qui m’échappait ; mais je me heurtai à un pan de mur dégradé, au pied duquel gisait un buste de femme. En le relevant, j’eus la persuasion que c’était le sien… Je reconnus des traits chéris, et, portant les yeux autour de moi, je vis que le jardin avait pris l’aspect d’un cimetière. Des voix disaient : « L’Univers est dans la nuit ! »