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niques peuvent asservir les intelligences et se servir de leurs forces divisées dans un but de domination. C’est ainsi que les dieux antiques ont été vaincus et asservis par des dieux nouveaux ; c’est ainsi, me dis-je encore, en consultant mes souvenirs du monde ancien, que les nécromans dominaient des peuples entiers, dont les générations se succédaient captives sous leur sceptre éternel. Ô malheur ! la Mort elle-même ne peut les affranchir ! car nous revivons dans nos fils comme nous avons vécu dans nos pères, — et la science impitoyable de nos ennemis sait nous reconnaître partout. L’heure de notre naissance, le point de la terre où nous paraissons, le premier geste, le nom de la chambre, — et toutes ces consécrations, et tous ces rites qu’on nous impose, tout cela établit une série heureuse ou fatale d’où l’avenir dépend tout entier. Mais si déjà cela est terrible selon les seuls calculs humains, comprenez ce que cela doit être en se rattachant aux formules mystérieuses qui établissent l’ordre des mondes. On l’a dit justement : rien n’est indifférent, rien n’est impuissant dans l’univers ; un atome peut tout dissoudre, un atome peut tout sauver !

Ô terreur ! voilà l’éternelle distinction du bon et du mauvais. Mon âme est-elle la molécule indestructible, le globule qu’un peu d’air gonfle, mais