Page:Nerlinger - Billets d'automne, 1893.djvu/33

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 29 —

zosenloch, le trou aux Français, comme les Allemands appellent la Taverne Gruber où l’on va pour avoir des nouvelles de France et pour être bien entre soi afin de causer librement. J’y avais retrouvé de vieilles connaissances, et en causant du passé le temps s’était écoulé vite.

Il était près de dix heures, et les habitués, bons bourgeois d’un certain âge déjà, commençaient à secouer soigneusement leurs pipes sur l’ongle du pouce. Depuis une heure déjà, le clairon allemand du poste de la place Kléber avait sonné sa plaintive retraite, triste et morne comme le hurlement d’un chien de garde. Tout à l’heure la cloche de la cathédrale va la sonner pour eux aussi. Il en est ainsi depuis bien des générations et les jeunes qui, dans leur coin, accueillent d’un sourire narquois la levée des vieux, finiront par les imiter à leur tour dans quelques années.

Comme eux, ils s’achemineront vers leur domicile tandis que l’antique cloche de dix heures bercera leur rêverie de son lent carillon. Oh ! cette sonnerie d’un charme