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MONROSE


quels hétéroclites personnages il me surprenait. Voyant qu’il ne les reconnaissait point, je les nommai. Son parti fut pris tout de suite. Il se souvint très-bien qu’on l’avait en horreur dans la maison du président lors de notre départ : n’importe, il lui semblait plaisant de se conduire comme s’il était encore l’intime ami de cette famille ; le voilà donc qui, les bras ouverts, va se jeter théâtralement dans ceux de madame de la Caffardière, et l’embrasse avec transport. Elle se tord le cou pour que cet excès de tendresse n’ait aucun effet qui puisse donner de l’ombrage à son époux, et peut-être la rendre elle-même suspecte d’y prendre du plaisir. Cependant le marquis sait comment il convient d’embrasser une femme dont le visage est habillé. Mais c’est cinq ou six fois qu’avec mille petits mots, dont seule je sentais l’ironie, il baise, à la jugulaire, l’ancienne Chloé. D’Aiglemont ne la quitte que pour fondre sur l’époux, qu’il n’étreint pas avec moins de convulsions, au grand détriment de la perruque poudrée à blanc, et qui, dans un instant, a fait part d’un tiers de sa poudre au frais habit noir endossé pour la première fois. Elle s’est même un peu déplacée, le marquis s’étant exprès accroché à la flottante crinière pendant sa pétulante embrassade.