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MONROSE


pas senti que, s’étant jetée sur la pointe de l’autre épée, elle était blessée au bras. À la vue du sang qu’elle a versé, Mimi tombe en faiblesse.

Ces deux championnes, la baronne surtout, pouvaient très-mal tourner, si des passants, que le cliquetis des épées avaient attirés, ne fussent survenus fort à propos. L’autre couple duelliste avait beaucoup plus tôt disparu de l’arène.

Comment ! Adélaïde et Rosimont s’étaient évadés ? — Oui, l’une à la poursuite de l’autre.

« — Écartons-nous à quelques pas, » avait dit Rosimont, comme l’autre couple commençait à croiser le fer. On avait bien voulu lui donner cette satisfaction. « Tenez, monsieur… (On observa que moitié peur, moitié parce qu’on était encravatée jusqu’au nez, et sous un chapeau fort rabattu, Rosimont ne reconnaissait point Adélaïde.) Monsieur, avait-il dit, mon métier n’est pas de me battre. Mon talent, qui est la propriété du public, exige que je ménage et mes jours et ma figure. Je n’ai que faire de quelque trou dans la poitrine, après lequel je ne pourrais plus chanter, ou d’un œil de moins, pour être aussi laid sur la scène que notre Granger[1], ou d’être pendant trois mois sur

  1. Fameux acteur sentimental, encore plus distingué par sa laideur et son amour-propre que par son talent.