plus encore par mes sentiments[1]. Je n’avais
rien aimé jusqu’au moment de te voir. Mes sots
adorateurs de province, — un histrion, que je
méprisais en me servant de lui comme d’un ustensile
commode pour les besoins de mes sens,
mais nullement cher ni précieux ; un Moisimont,
que je n’ai préféré pour m’unir à lui que parce
qu’il avait encore plus de sottise et moins de
caractère que ses compétiteurs, — rien de tout
cela ne m’avait fait sentir si j’avais une âme.
L’histrion, l’époux, le premier venu…, toi-même,
ne t’en déplaise, tout charmant qu’on
te voit, vous seriez tous également bons pour
moi, quant à l’objet physique ; mais je devais
t’aimer. Cette chance seule, et non la supériorité
de tes agréments, t’a tiré pour moi du pair,
et me fait être avec toi… ce qui m’a paru surpasser
ton attente. Il faut te l’avouer, Monrose,
dès ce fameux soir où je te vis à la chaussée
d’Antin, tu me plus…, mais je dis à l’excès ;
oui, tu me tournas subitement la tête. C’était à
toi que je buvais coup sur coup des rasades de
champagne. Ce fut à toi que je projetai d’élever
mon âme dans cette passade où je n’en-
- ↑ Lecteur, n’éclatez pas de rire, je vous prie, et ne déconcertez pas Mimi, qui va vous prouver qu’elle est sentimentale aussi… C’est pourtant un peu fort !