lève furieux. « Il est fou ! » La remarque m’irrite
encore davantage. Je la couvre d’un regard
foudroyant ; cependant une larme trahit ma faiblesse ;
je me sens avec dépit une bien singulière
espèce d’attendrissement, puisque je bouillais
en même temps de rage. Je veux sortir de
cette chambre funeste ; Mimi, à genoux, s’efforce
de me retenir… Mes pas l’entraînent sur
le tapis ; elle est en larmes à son tour. Mon
cœur se brise ; je me fais des reproches. Mimi
gagne son procès : je ne vois plus en elle qu’une
folle, capricieuse mais tendre, de qui ses lubriques
erreurs ne doivent point faire penser que
son cœur n’est capable d’aucun bon sentiment.
Je la relève tremblante, presque évanouie :
hélas ! le peu de force qui lui reste est pour me
presser contre son cœur ; elle mouille de ses
larmes une joue sur laquelle elle vient de coller
la sienne, craignant avec raison que ma bouche
ne refusât ses baisers. Je la porte au lit ; je l’y
couche ; ses bras me retiennent : nos pleurs se
mêlent[1], mon cœur palpite vivement sous la
- ↑ Ici Monrose paraîtra bien faible à ceux qui n’ont pas un excès d’amour des femmes, et par conséquent un inépuisable fond d’indulgence pour elles. Notre héros sera du dernier ridicule aux yeux de ces gens du siècle à qui le crime de lèse-amour-propre semble être le plus atroce et le seul qu’il soit impossible de pardonner.