Page:Nerciat - Monrose, 1871.djvu/207

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
182
MONROSE


qui n’a cessé de ricaner, de lorgner et de plier les épaules, car j’ai gardé, moi, tant que je l’ai pu, une décente neutralité. »

« Il est en effet impossible d’imaginer quelque chose de plus ridicule que ce qui se peignait à mon imagination d’après le récit de la spirituelle Belmont.

« L’ex-tragédienne tranchait de la duchesse, se renversait nonchalamment pour écouter, avec un théâtral abandon, son fade Moisimont, celui-ci en frais extrêmes d’éloquence, commandé à la baguette et souvent sorti, rentré on ne sait à propos de quels caprices. D’ailleurs, ces deux tourtereaux avaient l’air d’ignorer totalement qu’on était au spectacle. Mimi, fort négligée, sans rouge, pourtant très-jolie si elle n’avait pas été verte comme un chou, s’agitait, soit ennui, soit manières ; lorgnait cavalièrement les jeunes acteurs, le balcon et par-ci par-là quelques freluquets du parterre. La grasse amie, ressemblant bourgeoisement à quelque ragoûtante nièce de chanoine, frappait comme un briquet sur le froid d’Aspergue, qui ne donnait pas la moindre étincelle. Par-dessus tout ce monde-là, l’autre mari, allongeant le cou, bouche béante, dévorant d’attention la pièce et les acteurs, et pestant parfois contre sa femme, à