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MONROSE


ce qui exigerait que je mêlasse une trop forte dose de noir à mes couleurs. Pourquoi, sans vocation et, je crois, sans moyens pour la médisance, m’élèverais-je comme exprès, afin de vous donner de l’humeur, contre une infinité de choses qui souvent ont excité la mienne ?

Les Français ont cessé de me plaire depuis que, de gaîté de cœur, ils ont renoncé à être d’amusants originaux, pour devenir de sottes copies. Les Anglais m’ont envaporée ; les Allemands m’ont passablement ennuyée, tout en me forçant à les beaucoup estimer ; les Italiens m’ont excédée de leurs grimaces et de leur multiforme agitation. C’est pour ne pas délayer tous ces travers sur mon papier ; c’est, en un mot, pour n’être méchante sur le compte de personne en particulier, que je renonce à vous parler de moi. Le petit nombre d’amis choisis avec lesquels je passe doucement ma vie, ne mérite que des éloges. Or, l’éloge n’est pas ce qu’on lit avec le plus d’appétit, non plus que la description monotone d’un petit bonheur exempt de ces traverses romanesques, de ces oppositions, délicieuses pour le spectateur qui, pourvu qu’il ait du plaisir, ne s’embarrasse guères de ce qu’ont à souffrir les héros de la scène… Parlons donc de Monrose, que d’étonnants hasards