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LE DIABLE AU CORPS.





Le moment impatiemment attendu de se rendre à cette campagne où l’on devait si bien s’amuser était sur le point d’arriver. Le Palatin Morawiski, présenté chez la Marquise par le Prélat, y avait dîné. Ce Polonais, homme superbe à la vérité, mais ayant un certain air de gravité fiere et de recueillement qui décelait plus de penchant à l’ambition qu’aux folies voluptueuses, ne produisait pas sur l’ame et les sens de la Marquise, l’impression que l’introducteur s’était promise. À peine au moment du Champagne l’étranger parut-il s’humaniser, et pour lors, la transition fut si brusque, si affectée, qu’il sauta aux yeux des trois convives que cet homme venait de se dire :

Il convient cependant que je sois enfin sémillant et gai.

— La petite Comtesse, à côté du Prélat, lui serrait de tems en tems la main pardessous la nappe, pour lui faire comprendre combien elle le préférait pour menin, à son peu naturel ami. Au surplus, celui-ci n’avait rien dit, ni fait qui ne fût marqué au coin des plus nobles manieres et du savoir-vivre le plus raffiné. — La fin du repas n’eut pas été bien amusante, si le Comte, qui depuis le matin avait en poche la liste des acteurs de la future fête enrichie de notes rapides qu’y avait jetées l’officieuse Couplet, n’eût tiré ce papier de sa poche et proposé d’en faire lecture. Ces Dames témoignerent que cela leur ferait grand plaisir. Le Tréfoncier se mit donc à lire ce qui suit. —