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LE DIABLE AU CORPS.





Le Chevalier de Rapignac se rétablissait à vue d’œil et parlait déja de retourner à Paris, s’appercevant très-bien que la Marquise et son amie faisaient de lui peu de cas, et l’abandonnaient à peu près aux soins de sa subalterne conquête. Belamour se conduisait fort bien avec cet ennemi vaincu ; cependant leur réconciliation n’avait pas l’air d’être parfaite. Les deux Dames croyaient si bien connaître le coiffeur pour un garçon doué du meilleur naturel, quelles s’étaient persuadées que Rapignac avait eu tous les torts. La difficulté même qu’elles trouvaient à tirer de Belamour des lumieres au sujet de sa querelle, était pour elles une preuve de plus de l’avantage que leur favori devait aussi moralement avoir sur son suspect antagoniste. Un jour pourtant elles devinrent si pressantes et mirent tant d’apparence de vérité à le menacer de leur disgrace s’il ne leur révélait ce qu’elles étaient si curieuses de savoir, qu’enfin il s’y décida. Ce fut, par occasion, l’histoire abrégée de toute, sa vie que leur fit le candide Belamour. À ce qu’on a déja vu dans la 4me. Partie de cet ouvrage, voici ce qu’il ajouta :

BELAMOUR.

On peut, apparemment, bien aimer quelqu’un et lui souffler sa maîtresse. C’est du moins ce que fit, assez plaisamment, certain jeune officier, dont Mme. la Marquise se souviendra peut-être que je lui ai parlé ; le même qui, tandis que j’étais malade chez mon inhabile chirurgien, me pressait d’entrer à son service[1]

  1. Voyez le 2e. Volume, page 30.