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LE DIABLE AU CORPS.


QUATRIÈME PARTIE.


La Marquise, incapable d’avoir ce que les gens à sentiment nomment de l’amour, (qu’elle fait profession de regarder comme la chose la plus ridicule, et sur-tout la plus dangereuse,) ne laisse pas d’être sujette à des caprices d’une vivacité particuliere, qui leur donne, à bien peu de chose près, le caractere de cet amour, par elle si détesté. C’est une de ces fantaisies extraordinaires (rares au surplus chez cette Dame) que Belamour lui fait sentir. En se montrant, il a plu : les preuves qu’il a faites ont assuré sa conquête ; et les réflexions de la nuit n’ont pas peu fortifié les dispositions plus que favorables de la veille. C’est pour l’heureux Belamour que la Marquise, lubrique à l’excès, et des moins capable de négliger une occasion, quelle qu’elle soit, d’avoir du plaisir, a pourtant refusé les offres galantes de Philippine et de Nicole. — Il est midi : c’est l’heure où la Dame fait ordinairement sa toilette. C’est donc le moment charmant où, sans affectation, on peut faire appeller Belamour. — Démêler les cheveux, les rafraîchir, mettre des papillottes, faire une coiffure étalée, voilà de la besogne taillée, et du tems pour reprendre un roman des plus intéressans : voilà l’occasion de garder bien long-tems auprès de soi, sans s’abaisser autant que la veille, un être auquel on craint d’avoir déja laissé voir trop de faiblesse. Cette extrême liberté de la veille était bonne, s’il n’eût été question que d’une passade ;

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